Encore un départ bien matinal pour une dernière étape, par son tracé final et sa longueur elle est aussi l’une des plus difficiles. Après une mise en jambe relativement facile, bien vite les premières difficultés se profilent, le passage de la vallée de la Creuse à Argenton donne le signal, dès maintenant, les portions de plat seront rares et la route vallonnée à souhait.
Fini les longues lignes droites ennuyeuses et monotones, dès ce passage symbolique de la Creuse, le Limousin nous montre sa diversité, son charme et sa campagne où il fait si bon vivre. Après le repas de midi à la Souterraine et l’accueil chaleureux des élus locaux, il nous faut reprendre la route avec la perspective d’en avoir bientôt fini avec le vélo. Cette dernière portion, au relief agressif nous montre une campagne verdoyante, terriblement séduisante dans une nature préservée où il fait bon vivre. A chaque virage, ce Limousin méconnu, isolé des grands centres touristiques nous offre par cette belle journée d’été, sa plus belle image, sa diversité touristique, en somme une invitation naturelle à découvrir sa qualité vie et ses nombreux atouts. De passage à Saint Pardoux, charmant village du Haut Limousin, nous effectuons notre dernière pause dans la très ancienne halle au marché. Une dernière collation particulièrement réussie tant sur le point culinaire que sur les personnalités présentes. Nous retrouvons André Dufraisse, de son petit hameau de Silord en voisin, il a tenu à venir saluer ses amis de l’ARPAD et surtout revoir son vieux complice des sous bois : Rolf.
Leurs retrouvailles sont toujours un temps fort dans leur intimité, et ils forment une belle image de célébrité sportive. Faut-il rappeler qu’à eux deux ils totalisent huit titres de champion du monde, André le spécialiste de la course dans les labours et Rolf le voltigeur, se jouant des obstacles avec agilité. Comment ne pas leur vouer une réelle admiration pour ce qu’ils ont apporté au sport en général et à leur pays comme image de respectabilité et de sportivité. Avoir la chance de connaitre ces deux personnalités attachantes, de les côtoyer, est un immense honneur.
J’ai aussi salué avec grand plaisir Madame Barget, venue s’imprégner de l’ambiance amicale de la caravane et retrouver son mari afin de nous accompagner jusqu’à Oradour. Ambiance fraternelle de fin de randonnée mais aussi une petite touche de la gastronomique locale avec en dessert le célèbre clafoutis cher aux limousins, un exemple de réussite qui n’a pas laissé nos collègues allemands indifférents sur nos spécialités pâtissières.<br />Une fin de randonnée particulièrement réussie qui ne laisse de que de bons souvenirs. C’est aussi une excellente occasion qui m’est offerte pour remercier tous ceux qui se sont investis pour monter et organiser cette randonnée et d’une façon plus générale un grand merci à l’ensemble du staff, bénévoles de l’ombre, mais indispensables car rien ne pourrait avoir lieu sans leur implication personnelle, leur volonté, sans oublier leur gentillesse.
La traversée de Cieux voit le peloton se renforcer considérablement. En effet de nombreux cyclistes et amis des participants ont mis un point d’honneur à parcourir les derniers kilomètres en compagnie de la caravane. Parmi ce renfort, citons les jeunes enfants de l’école de cyclisme de Saint-Junien, heureux et fiers d’accompagner ce peloton. Oradour sur Glane se profile tout au bout de la dernière ligne droite. Dans le bourg la foule est nombreuse et salue joyeusement cette belle initiative et l’entrée du peloton dans la localité, portant un message universel de paix, de fraternité et d’espoir.
Chaque participant, allemand et français après ce long périple sur les routes d’Allemagne et de France est aujourd’hui heureux et fier d’avoir apporté sa petite contribution au service d’une noble cause et dire au monde de la façon la plus simple : Plus jamais ça, plus jamais de telles horreurs entre nos deux peuples. Sans doute galvanisé par l’accueil chaleureux dont a fait preuve la population d’Oradour, la soirée de clôture nous a réservé quelques surprises. Les nombreuses prises de parole des officiels ont été empreintes de chaleur, d’émotion et d’amitié d’une rare intensité.
Dans la prolongation des festivités lorsque arriva l’heure du traditionnel apéritif, d’une façon spontanée, sans concertation préalable, un élan d’amitié submergea le protocole et l’on vit l’ensemble de l’assistance se lever et envahir la salle pour ne former qu’un bloc compact et solide dans un élan de grande sincérité et de compréhension.
Conclusion :
Par ce geste simple de partage et d’amitié, nul discours ne pouvait mieux exprimer les pensées de chacun durant ce grand moment de communion. Incontestablement grâce au sport et à une volonté partagée, cette randonnée de l’amitié et de la réconciliation à pleinement rempli son rôle. Elle s’inscrit en lettres capitales dans l’histoire de ces deux villes martyres que sont Dachau et Oradour sur Glane. Sur ce beau parcours, malgré mon impossibilité à participer pleinement, j’ai la satisfaction d’avoir connu et rencontrer des femmes et des hommes remarquables et forts sympathiques. Pour être de la même génération, je connaissais le champion Rolf Wolfshohl. Sur cette randonnée, j’ai découvert un homme remarquable de simplicité et d’humanisme. Sa gloire de champion glanée sur les routes d’Europe durant sa longue carrière ne l’a pas mis à l’abri des terribles épreuves de la vie dont le destin aime parfois nous réserver la primeur. Durant cette trop courte complicité, Gilette et moi avons découvert un Grand Monsieur.<br />J’ai aussi la satisfaction d’avoir fait de nouvelles connaissances et c’est bien là le but et l’intérêt de toutes randonnées cyclistes. Après avoir entendu bien des discours tout au long de ce long périple sportif, pour notre avenir faisons en sorte que toutes ces belles paroles de paix et d’amitié soient entendues et appliquées sans aucunes différences ni injustices. Alors seulement cette randonnée de l’espoir, de l’amitié et de la réconciliation entre nos peuples, voulue au plus haut niveau, aura véritablement rempli toute sa mission et son but.
Je tiens à remercier l’ARPAD association des Amis de Raymond Poulidor et André Dufraisse, et ses partenaires publics et privés qui ont contribué à la réussite de cette manifestation pour l’histoire.
Michel CORAND